Créé le 24-10-2011 à 10 h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le lundi 24-10-2011 à 11 h35 | AFRIQUE REDACTION PAR : AR
La réélection à 78 ans du président Paul Biya fait craindre que le Cameroun ne s'enfonce dans l'immobilisme alors que les défis abondent dans un pays dont un habitant sur quatre vit avec à peine un peu plus d'un euro par jour.
Les partisans du chef de l'Etat, réélu une nouvelle fois le 9 octobre, assurent qu'après quelque trente ans de pouvoir, il va réaliser de grandes choses pendant son prochain septennat.
"Le plan du président Biya est de faire quelque chose de sa victoire. Il a proposé un programme" de grands projets, souligne Grégoire Owona, ministre chargé des Relations avec les Assemblées et secrétaire général du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti présidentiel.
Les défis s'offrant au pays sont considérables. Un tiers des 20 millions de Camerounais n'a pas accès à l'eau potable et à l'électricité et une personne sur quatre vit avec moins de 1,1 euro par jour. Le taux de croissance (3,2% en 2010) est le plus faible de la sous-région malgré des richesses minières.
Mais beaucoup sont sceptiques.
"Maintenant qu?il (Biya) a gagné, il va rester au pouvoir. Cela a toujours été son objectif dominant. Il change de mots d'ordre mais en réalité le même mode d?action demeure c?est-à-dire une politique essentiellement préoccupée par conserver le pouvoir et bénéficier des privilèges", estime le politologue et universitaire camerounais Mathias Nguini Owona.
"Il a annoncé le passage des +Grandes ambitions+ (slogan de M. Biya lors de la présidentielle de 2004) aux +Grandes réalisations+ (slogan du nouveau mandat). Mais je n?y crois pas parce que c?est sa rhétorique habituelle", estime-t-il.
Peu après son arrivée au pouvoir en 1982, M. Biya avait très vite parlé de "rigueur et moralisation" de la gestion publique. Mais, "il n'y a qu'à réprendre ses discours ces dernières années, dans laquelle il désespère devant l'ampleur de la corruption" souligne Alain Fogue, universaitaire et opposant. "C'est révélateur du phénoménène qui est devenu une pandémie: la rigueur est bien molle."
M. Biya "peut ponctuellement agir pour l?intérêt de la collectivité mais (...) s?il faut choisir entre agir pour la communauté et rester au pouvoir, le choix qu?il fera c?est de rester au pouvoir", pense le politologue Nguini Owona.
Un autre politologue, militant du RDPC, Richard Keuko, s'insurge: "A quoi ça sert de rester au pouvoir pour (y) rester? Je ne vois aucune personnalité rester au pouvoir pour rester. Il (M. Biya) a annoncé qu?il allait transformer le pays en un +immense chantier+" dès janvier 2012, précise-t-il, soutenant que M. Biya en a "la capacité".
Certains craignent aussi un mouvement social. En février 2008, des émeutes contre la vie chère et contre le projet de suppression de la limitation du nombre de mandats présidentiels, adopté quelques semaines plus tard, avaient coûté la vie à 40 personnes, selon un bilan officiel, à au moins 139 d'après des ONG.
L'opposition n'est pas non plus exempte de critiques.
Avant l?annonce vendredi des résultats, le principal rival du président, John Fru Ndi, dont les résultats diminuent à chaque élection (35,97 en 1992, 17,4% en 2004, 10,71% en 2011) et six autres candidats avaient déclaré rejeter une "mascarade électorale" et appelé à manifester.
Mais le politologue Nguini Owona estime que le chef de l'opposition "est dépité de ne pas arriver à défaire le système (Biya) et ça exprime aussi une certaine forme d?impuissance".
"La volonté de manifester n'est pas critiquable sauf que le système étant un système qui verrouillé l?espace public, il interprète toute volonté de manifester comme une entreprise de déstabilisation".
L'analyste pense que "l?opposition doit fondamentalement se remettre en cause".