Créé le 30 -11-2011 à 03h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le mercredi 30-11-2011 12H 40| AFRIQUEREDACTION : LE PHARE
Le scandale a éclaté quelques jours avant le scrutin. Un membre du Parlement britannique, Eric Joyce, chef de la commission interpartis consacrée à l'Afrique des
Grands Lacs, a rendu public un rapport dans lequel il livre son estimation du montant des sommes détournées par le pouvoir congolais dans le cadre de cession d'actifs miniers : 5,5 milliards de
dollars (4,2 milliards d'euros). Il met en ligne des contrats cachés jusqu'ici et décrit ce qu'il qualifie de «façon de procéder systématique, consistant à brader des actifs miniers congolais à
des compagnies écran, presque toutes enregistrées aux Iles Vierges (…) avant de les céder à des proches». Certaines de ces sociétés ont été associées à l'homme d'affaires israélien Dan Gertler,
qui avait déjà reçu du père de l'actuel chef de l'Etat la concession de la commercialisation de l'ensemble des diamants congolais.
L'estimation peut prêter à discussion, mais les contrats mis en ligne par M. Joyce appuient l'idée de son «modèle» de détournement. Le «pillage» des ressources de
la République démocratique du Congo (RDC) n'est pas seulement le fait de bandes armées dans l'Est ou depuis les pays voisins. La question est d'autant plus aiguë que le pays s vu sa production
minière augmenter depuis la fin de la seconde guerre du Congo (1998-2003). Depuis 2005, la production de cuivre a été multipliée par cinq. En 2010, la croissance de la RDC s'établissait à
7,2%.
Derrière la dimension politique de l'élection se dissimule Un enjeu économique de taille. De nombreux observateurs se sont émus des conditions 'dans lesquelles des
cessions d'actifs étaient faites à des entreprises immatriculées aux lies Vierge (le député britannique en à recensé 45), et estiment que les bénéfices réalisés lors de ces cessions auraient
servi à financer la campagne électorale.
La Gécamines, l'ex-empire minier national tronçonné, a été particulièrement mise en cause. A Kinshasa, Albert Yuma Mulimbi, président du conseil d'administration de
la Gécamines, reconnaît «28 accords de joint-ventures avec des étrangers dans lesquels nous sommes partenaires minoritaires», mais assure avoir «décidé de demander un audit de ces compagnies par
un cabinet international», qui reste à identifier. Il remarque: «Depuis 2002, nous n'avons touché aucun dividende, ce n'est pas normal», tout en précisant qu'il ne compte pas demander la
renégociation des contrats. C'est ce qui est arrivé à plusieurs sociétés, dont First Quantum Minerals qui avait investi 450 millions de dollars dans une mine de Kolwezi, avant de voir son contrat
annulé en 2009 et la mine cédée pour 175 millions au groupe ENRC.
« Le jeu de passe-passe avec les droits mini3rs est en contradiction 'ave les discours nationalistes du pouvoir. De plus, ce ne sont pas des pratiques nouvelles,
mais de vieilles ficelles», note Thierry Vircoulon, le directeur Afrique centrale de l'international Crisis Group. La déréliction du système engendrée par ce pillage avait entraîné la fuite du
maréchal-président Mobutu en 1997 tandis que l'Etat s'écroulait.
« Scandale géologique »
Pour l'instant, note une bonne source : «Les investisseurs se bousculent encore, mais ce ne sont pas les plus grandes sociétés minières.» Environ 3 milliards de
dollars ont été investis au Congo en 2010.
Le qualificatif de «scandale géologique» appliqué au pays sonnait à l'origine comme un sifflement admiratif, en référence à l'importance des réserves de mirerais ou
pierres précieuses (cobalt, cuivre, coltan, diamants, uranium, etc.). Le Congo-Kinshasa a tous lies atouts pour devenir un géant régional, même si son économie est peu diversifiée (73,7 % des
exportations du pays sont constitues de métaux et 10,7 % Je diamants).
Des contrats douteux avaient déjà été attribués avant le scrutin du retour à la paix de 2006, remporté par Joseph Kabila. Dans la foulée, il avait fallu faire le
ménage sous pression des institutions financières internationales qui accompagnaient parallèlement le pays vers le point d'achèvement de l'Initiative PPTE (Pays pauvres très endettés). Atteint
fin 2009, celui- ci allait permettre de bénéficier d'une réduction de la dette publique de 12,3 milliards.
Une «revisitation» de 61 contrats a donc eu lieu, assimilée par une bonne source à un «racket». Deux contrats seulement devaient être annulés, dont celui de First
Quantum Minerals.
Les responsables du Fonds monétaire international (FMI) avaient beau insister sur la nécessité de «renforcer l'Etat de droit ainsi que d'améliorer la gouvernance»,
les cessions d'actifs dans des conditions troubles se sont multipliées.
Concernant le pétrole, la même opacité prévaut. La production congolaise est faible (23 000 barils par jour). Mais plusieurs blocs très prometteurs situés au bord
du lac Albert, dans le nord-est du pays, ont été découverts. Ils semblaient promis au groupe Tullow, mais ont été attribués à deux sociétés inconnues, Caprikat et Foxwhelp, dont le siège est aux
Iles Vierges britanniques. A leur tête se trouvent Khulubuse Zuma, le neveu du président sud- africain, et un avocat de ce dernier.