Crée le 23-12-2011- 06h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le vendredi 23-12-2011 06H10 AFRIQUE REDACTION PAR: LE POTENTIEL
Par Modeste MUTINGA
Le sénateur Modeste Mutinga tire la sonnette
Le sénateur Modeste Mutinga, élu des élus de la province du Kasaï Occidental, se dit préoccupé par la façon dont les opérations de compilation des résultats des législatives nationales se déroulent dans sa province.
C’était au cours d’un point de presse animé, hier mercredi, au Palais du peuple. Il dénonce de graves irrégularités qui entachent les résultats préliminaires des législatives publiés, le lundi 19 décembre, par la CENI. Par conséquent, le sénateur invite cette institution à tout mettre en œuvre pour que la vérité des urnes soit respectée, au risque d’ouvrir la porte à la haine et à la division.
Par ailleurs, il fustige le comportement inique de certains acteurs politiques du Kasaï Occidental qui se complaisent à jouer aux pyromanes en traitant les Luluwa d’être «un peuple insignifiant», leur imputant à tort le faible score réalisé par le candidat n03 dans cette province. Cette discrimination faite à haute voix ne cache rien sur les intentions de son auteur de mettre de l’huile sur le feu en ce moment où des appels fusent en faveur de l’apaisement et de la paix. Ci-dessous, le texte intégral lu par Modeste Mutinga.
Mesdames et Messieurs de !a presse,
Je vous remercie d’avoir répondu à mon invitation. Je voudrais par la communication de ce jour, en ma qualité de sénateur, élu des élus de la province du Kasaï Occidental, faire part au Président de la République, à la CENI et à l’opinion nationale, de mon inquiétude consécutive à la situation post électorale prévalant dans ma province d’origine.
D’après les informations en ma possession, le scrutin législatif du 28 novembre dernier est sur le point de décevoir gravement les espoirs de la population du Kasaï Occidental. En effet, au lieu d’être une affirmation de la démocratie en ce qu’il devait permettre à ce peuple délaissé de redistribuer les mandats à ses meilleurs filles et fils, il risque d’ouvrir la porte à la haine et à la division.
Il y a d’abord les conséquences de multiples incidents qui ont émaillé l’opération de vote le lundi 28 novembre 2011. Comme vous le savez sans doute, de nombreux bureaux de vote à Kananga et ailleurs dans la province ont été soit saccagés et incendiés, soit interdits d’ouvrir leurs portes à la suite des dénonciations, vraies ou supposées, de tentatives de bourrages des urnes, empêchant ainsi de paisibles citoyens de remplir leur devoir civique. Ce qui constitue une grosse hypothèque sur la vérité des urnes.
Pour ne pas les citer tous, nous pouvons relever quelques cas des centres ayant subi la loi des vandales. Dans la ville de Kananga, des centres de vote de l’école primaire Lusambo, dans la commune de la Ndesha, de l’école primaire de Lukonga St Paul Diyeba de Nkonko Tshiela, Ntambwe St Bernard dans la périphérie de la ville, de Nsapo Nsapo et de Bena Leka dans le territoire de Demba, ainsi que de Tshimbalanga dans le territoire de Dibaya, ont été mis à sac.
Il faut ensuite dénoncer des irrégularités intervenues au niveau de la compilation des résultats, notamment la mise à l’écart de témoins, ce qui pose avec acuité le problème de la crédibilité et de la sincérité du processus. Ce discrédit est d’autant plus à redouter que le verdict partiel des législatives déjà publié de certains centres de compilation au Kasaï Occidental est tiré d’une partie et non de l’ensemble des bureaux.
Les chiffres suivants suffisent amplement à dénoncer ces irrégularités
Ville de Kananga : 84 bureaux compilés sur 508;
Ville de Tshikapa : 100 bureaux compilés sur 348;
Territoire de Kazumba : 200 bureaux compilés sur
440; Territoire de Luebo : 250 bureaux compilés sur
300; Territoire de Kamonia : 280 bureaux compilés sur 902;
Territoire d’Ilebo : 250 bureaux compilés sur 300; Territoire de Demba : 120 bureaux compilés sur 342.
Plus grave, les opérations de compilation ont été stoppées net, semble-t-il, sur ordre des autorités de Kinshasa non autrement identifiées. Les mêmes autorités auraient décidé de répartir les sièges par tribu et par groupement, et non selon la vérité des urnes. Ceci expliquerait cela.
Comme je viens de vous le décrire, les élections présidentielle et législatives dans le Kasaï Occidental se sont déroulées dans un climat délétère, fait de tensions généralisées exacerbées par l’intolérance des cadres politiques du Kasaï Occidental. Les résultats de la présidentielle sont connus. Ce n’est un secret pour personne que le candidat n° 3 y a récolté un score plutôt faible. Ce que nous déplorons sincèrement.
Il ne sert à rien de chercher des boucs émissaires comme tentent de le faire certains acteurs politiques originaires de la province. Il est de bonne politique, par contre, d’analyser froidement les causes profondes de cette contre-performance. A notre humble avis, les éléments ci-après méritent d’être relevés et étudiés avec responsabilité.
1. Le Kasaï Occidental est victime depuis le régime de la deuxième République d’une sanction politique qui l’a, de longues années durant, fait reculer dans tous les domaines et a laissé des traces indélébiles.
2. La province a fondé de grands espoirs sur les autorités qui ont succédé à l’Etat totalitaire. Malheureusement pour ses habitants, aucune amélioration de leur vécu quotidien n’a été enregistrée. Le choix des gouverneurs qui se sont succédé à la tête de cette entité politico-administrative n’a jamais respecté leur volonté, si bien que les mandats des uns et des autres se sont déroulés sur fond de contestation de leur légitimité.
3. Cette province enclavée qui ne compte qu’une entreprise, la Bracongo, n’a pratiquement pas bénéficié des bienfaits du programme des cinq chantiers. Les travaux d’assainissement de sa voirie urbaine sont à l’arrêt, à peine commencés la veille des élections. Le Président de la République a certes inauguré le démarrage des travaux du barrage de Katende il y a quelques mois. Dès qu’il a tourné les talons, ingénieurs et travailleurs affectés à l’érection de cet ouvrage sont partis en courant, sans explication de leur part ni des autorités provinciales et nationales.
4. Le pouvoir coutumier a été laminé par des décisions iniques des autorités centrales, avec comme effet d’opposer les uns aux autres les membres des familles régnantes.
Pendant ce temps, les acteurs politiques, toutes tendances confondues, n’ont rien fait pour améliorer cet état de choses et s’ingénient par contre à faire porter le chapeau aux seuls Lulua qualifiés à tort par certains acteurs politiques de «peuple insignifiant». Cette démarche dangereuse a déjà creusé de profondes divisions entre les deux districts du Kasaï Occidental et, si l’on n’y prend garde, peut déboucher sur des affrontements que personne ne souhaite. Ne condamnez pas les Lulua par contumace.
Devant cette situation on ne peut plus explosive, je prends la responsabilité de tirer la sonnette d’alarme pour que des corrections adéquates soient opérées à l’occasion de la publication des résultats des législatives. S’ils n’exprimaient pas la vérité des urnes, ils pourraient constituer la goutte susceptible de faire déborder le vase. Ce qu’il faut à tout prix éviter.
La stratégie maléfique étant celle de se référer à la loi, d’exiger les procès-verbaux alors qu’on ne les a pas distribués et que les témoins ont été, dans la plupart des cas, chassés et la compilation faite à huis-clos, il y a lieu d’inviter la CENI à revoir sa copie.
Je souhaite enfin que, à la lumière des enseignements tirés du scrutin du 28 novembre 2011, les provinciales à organiser prochainement se déroulent dans une ambiance empreinte de sérénité, sinon le processus sera vicié.
Je vous remercie