Crée le 15-01-2012- 02h20 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le dimanche 15-01-2012 02H20 AFRIQUE REDACTION PAR : SYFIAGRANDSLACS
A Beni, à l’est de la Rd Congo, l’insécurité persistante n’arrange pas les affaires de petits commerçants et exploitants de débits de boisson, habitués à vendre jusque tard dans la nuit. Mais dans de nombreux foyers, des femmes se frottent les mains, car leurs maris rentrent désormais plus tôt chez eux…
"A quelque chose malheur est bon !" Sourires aux lèvres, cette femme semble avoir retrouvé la joie de vivre, depuis que son époux rentre tôt à la maison. "Avant, il revenait après minuit. Maintenant, il est là même à 19 heures. C’est un miracle !", se réjouit-elle. A cause de l’insécurité qui persiste depuis plusieurs mois dans cette ville de l’est de la Rd Congo, tous les petits commerces et débits de boisson ferment en effet leurs portes à 18 heures. Les hommes, qui passaient leur temps à boire et à jaser dans les bars, avant de retourner chez eux, n’ont plus d’autre choix : "Dès qu’on finit le travail, on achète un peu de sucre pour le petit déjeuner du lendemain et on rentre directement chez soi. Car, vaut mieux être attaqué la nuit chez soi que dehors", explique Christophe Kambale, activiste des droits de l’homme.
Durant le deuxième trimestre 2011, une dizaine de personnes ont été assassinées par balles à Beni par des bandits non autrement identifiés. Des maisons et boutiques
ont aussi été attaquées et pillées, sans qu’aucune enquête ne soit menée pour retrouver les auteurs de ces actes. Et avant la tenue de la présidentielle et des législatives du 28 novembre 2011,
des rumeurs circulaient dans la ville, faisant état d’éventuelles attaques des groupes de rebelles ougandais, coalisés aux forces d’autodéfense populaires locales, très actives dans cette
province du Nord-Kivu.
"Que cela perdure !"
Ce climat d’insécurité s’est renforcé après l’évasion de la prison centrale de la ville, fin 2011, de centaines de criminels qui se sont retrouvés dans la nature.
Entre août et novembre de la même année, les camps militaires d'Oicha et le bureau administratif de l’auditorat militaire, avaient aussi été attaqués, renforçant la peur des habitants. Ainsi, au
quartier Kalinda, au sud de la ville, on ne voit plus aucun piéton dès 20 heures sur la rue Bebel, qui mène vers les quartiers résidentiels. Même le poste de police de la commune de Mulekera,
situé non loin de là, ne rassure personne.
A Bungulu, une commune du nord de la ville où l’ambiance régnait jusque tard au rond-point Kanzulinzuli, les rues deviennent aussi désertes dès la tombée de la
nuit. Même les conducteurs des taxis-motos qui assurent le transport dans cette ville de 500 mille habitants, rangent leurs engins avant 19 heures. "Nous ne prenons plus le risque de faire le
taxi la nuit, car nous sommes souvent victimes des braquages [des bandits] qui nous dépouillent de nos recettes et ravissent parfois nos motos", raconte Matthieu Kambale.
Ce climat de peur généralisée inquiète tous les habitants. Mais, pour les épouses habituées à rester seules au foyer parfois jusque tard dans la nuit, sans leurs
maris, c’est une autre affaire. Retrouver leurs hommes plus tôt qu’auparavant, est vécu par ces épouses esseulées comme une nouvelle aventure amoureuse. Sans s’accommoder certes de l’insécurité
que tous voudraient voir prendre fin, elles souhaitent de voir leurs maris continuer à rentrer de bonne heure au foyer.
La sécurité pour que la vie reprenne
Les débits de boissons, où la clientèle particulièrement masculine augmente le soir après les heures de travail, font cependant grise mine. "Notre profession paye
lorsque la circulation est garantie. Sans la sécurité, nous ne gagnons rien", se plaint Katembo Musavuli, propriétaire d’un cabaret. Ne vendant plus que la journée, il conditionne le paiement des
taxes et impôts à la restauration de la sécurité.
Les boîtes de nuit, elles, ne savent plus quoi faire. Certaines n’ouvrent plus désormais que pendant le week-end. Seuls quelques accrocs de la bière et de la folle
ambiance s’y aventurent encore, mais à leurs risques et péril. Au grand regret des tenanciers des boîtes, mais aussi des vendeuses de charmes, qui retiennent souvent les hommes loin de leurs
foyers.
Jacques Kikumi