Le 18-07-2011 à 09h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE | RDC | Mis à jour le Lundi 18- 07-2011 | 09h20| PAR : AFRIQUECHOS
31 juillet 2011, telle est la date butoir fixée par Kinshasa aux entreprises industrielles forestières pour déposer les cahiers des charges qui formalisent leurs obligations socioéconomiques vis-à-vis des communautés forestières et leurs plans de gestion destinés à identifier la valeur de la forêt concédée.
C’est après examen de ces documents que seront validés et signés les nouveaux contrats de concessions forestières (CCF), conformément aux dispositions du code
forestier de 2002. Ainsi prendra fin le processus de conversion des anciens titres forestiers. Et avec lui, un vaste toilettage de la filière bois engagé en 2002, avec l’instauration d’un
moratoire interdisant l’octroi de nouveaux titres ou le renouvellement et l’extension de ceux déjà concédés, et la résiliation, pour non respect des obligations contractuelles, de 164 contrats
forestiers (soit environ 25,5 millions d’hectares de forêts), sur les 285 passés en revue. En 2005, le toilettage s’est poursuivi, avec la prolongation du moratoire et le lancement officiel du
processus de conversion proprement dit. Chapeauté par une Commission interministérielle pilotée par le Ministère de l’Environnement, de la Préservation de la Nature et du Tourisme et appuyé
techniquement par le groupement WRI-Agreco, ce processus fait une large place aux représentants de la société civile et des communautés vivant en zone forestière.
Pour le concessionnaire, l’obtention d’une conversion était assortie de conditions : avoir obtenu un titre avant le moratoire, s’être acquitté de toutes les taxes
en vigueur, posséder une usine de transformation de grumes si le contrat le prévoyait et ne pas avoir de conflits avec les communautés locales. C’est sur cette base que 80 titres, sur 156
demandes de conversion, ont été retenus en février dernier. Pour l’heure, ce sont donc quelque 12,2 millions d’ha, représentant environ 4 % de la superficie forestière de la République
démocratique du Congo (RDC), qui sont concédés. Tous les titres retenus seront-ils validés ? C’est ce que déterminera la commission chargée de statuer sur les cahiers des charges et les plans de
gestion, dernière étape du processus de conversion.
La validation des contrats et, dans la foulée, l’abrogation des anciens titres, mettront-elles fin au moratoire ? Non, car d’autres préalables sont à régler.
Notamment le plan de zonage forestier participatif, qui doit délimiter l’affectation des terres et, ainsi, permettre de mettre fin au chevauchement des titres miniers, fonciers et forestiers et à
leur empiètement sur des aires protégées, les forêts des communautés locales ou des concessions légalement converties. Un plan qui a déjà été lancé. « Un guide opérationnel portant normes
de macro-zonage forestier a été validé, le comité national de pilotage du zonage forestier, comprenant divers ministères, les industriels et la société civile, a été mis en place et un
financement de la Banque mondiale, de 2,5 millions de dollars, débloqué pour démarrer l’opération qui couvrira trois provinces – l’Équateur, la Province orientale et le Bandundu. On a aussi
validé les termes de référence pour le recrutement d’un consultant », informe José Lofanga Ilanga, directeur au Ministère de l’Environnement. Dans ces conditions, la levée du moratoire ne
pourrait pas intervenir avant 2, 3 voire 4 ans, le temps de finaliser le plan de zonage.
Le port fluvial de KinshasaPhoto : Muriel Devey(AEM)
Pour autant des ong de défense de l’environnement- dont Greenpeace, Rainbow et Global Witness – craignent sa levée prochaine. Une crainte justifiée ? « Il y a des
pressions sur le gouvernement pour la demande de concessions de toutes sortes. Or ce dernier a besoin d’argent », explique René Ngongo, chargé de campagne “forêts” de Greenpeace. Parmi les
projets qui inquiètent les Ong figurent celui de la ZTE Agribusiness Congo, filiale du fournisseur chinois en télécommunication, Zhongxing Telecom (ZTE), qui envisage de planter 3,5 millions d’ha
de palmier à huile. Où trouver les terres ? D’où l’urgence de finaliser le plan de zonage pour éviter que des terres à vocation forestière ne soient destinées à de l’agro-industrie. L’autre
projet, qui a soulevé un tollé dans l’Équateur est celui du finlandais Prinitas Financing, qui proposait la construction de centrales électriques à base de biomasse, contre l’octroi de
concessions minières et forestières pour une durée de 75 ans, alors que la durée maximale d’une CCF est de 25 ans.
Pour Françoise Van de Ven, secrétaire général de la Fédération des Industriels du Bois, la crainte des Ong ne serait pas justifiée. « Même si des sociétés voulaient
des concessions, ce n’est pas possible. Outre les contraintes du code forestier et de ses décrets d’application, de nouvelles engagements ont été pris de part et d’autre pour finaliser le
processus avant d’octroyer de nouvelles concessions ». Même constat fait par Folanga Ilanga. « La RDC est le seul pays de la sous-région à avoir observé le moratoire depuis 2002 et aucun
délai n’a été fixé dans les textes. Il faut rappeler que l’attribution de nouvelles concessions se fera par adjudication. Le processus est donc transparent et contrôlé », souligne-t-il. Du coup,
la physionomie de la filière, dominée par des intérêts européens, notamment suisses, ne devrait pas changer dans l’immédiat. Reste que le coût des plans d’aménagement, qui varie entre 3 et 5
dollars par ha, et leur suivi annuel, ainsi que les dépenses liées à la certification pourraient, à terme, exclure certains exploitants de la filière. En outre, une fois le moratoire levé, de
nouvelles sociétés, notamment asiatiques, pourraient s’implanter dans la filière. Muriel Devey(AEM)