Créé le 15 -08-2011 à 10 h20 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN
| ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le dimanche 15 -08-2011 à 10 h30 | AFRIQUE REDACTION PAR : LE POTENTIEL
Victimes, parents de victimes, plusieurs organismes congolais et internationaux fondent beaucoup d’espoirs sur la Cour spécialisée, dont le texte de loi la créant
est présentement sous examen au Parlement, pour qu’enfin soient jugés en République démocratique du Congo les auteurs et les commanditaires des « crimes les plus graves » qui y sont commis. Mais,
au Sénat, les violons sont loin de s’accorder sur son « opportunité ».
Le projet de loi portant création, organisation et fonctionnement de la Cour spécialisée des droits de l’Homme suscite en RDC de nombreuses interrogations. Elles
portent essentiellement sur son objet, sa finalité, son opportunité, sa pertinence, son adéquation et ses conséquences au regard du droit positif et du droit international, sa faisabilité au
double plan matériel et du personnel.
De composition mixte, cette Cour comprendra notamment un parquet général et exercera sa compétence pour les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre et de
génocide commis à partir de 1990, crimes qui sont par ailleurs imprescriptibles, note le compte rendu.
Or, la non recevabilité du projet de loi est déjà envisagée par certains sénateurs. C’est dire combien les difficultés sont majeures quant à l’obtention d’un
consensus sur une question hautement sensible.
« Pareille décision serait politiquement lourde de conséquences, non pas à cause de la perspective éventuelle de l’imposition par les Nations unies d’une
juridiction internationale créée en dehors de toute initiative nationale, mais parce que nous aurons apporté la preuve que la classe politique congolaise demeure imperméable à la demande de
justice, mieux aux complaintes de nos populations meurtries depuis fort longtemps par les atrocités les plus abjectes qu’aucun autre peuple à travers le monde n’a jamais connu, du moins si l’on
s’en tient au nombre de victimes. 5.000.000 de morts, presque autant de déplacés, plusieurs femmes violées fréquemment chaque année », explique le ministre de la Justice et des Droits humains,
Luzolo Bambi Lessa.
Les partisans du projet de loi du gouvernement relatif à la création de cette Cour spécialisée plaident pour « son indépendance, sa crédibilité, son efficacité, la
participation du personnel international dans tous les organes de la Cour, l'extension de sa compétence pour inclure les crimes actuels, la clarification du rôle des victimes, la protection des
témoins dans le cadre des procès, ainsi que le renforcement des droits des accusés ».
A la conférence co-organisée à Goma (Nord-Kivu) du 6 au 8 avril 2011 par Human Rights Watch et la Coalition congolaise pour la justice transitionnelle (CCJT)
donnant suite au rapport du Projet Mapping de l’ONU, il avait été souligné que « la création d'une Cour spécialisée mixte peut aider à briser le cercle vicieux de violations et d'impunité en
République démocratique du Congo. Pour que cette Cour rende justice aux victimes de façon efficace dans le cadre de procès équitables, il est essentiel de répondre aux principales inquiétudes de
la Société civile. Les victimes ne méritent pas moins ».
Les participants avaient déclaré que « le gouvernement congolais devrait revoir et renforcer le projet de loi portant création d'une cour spécialisée mixte
nationale et internationale qui permettra de traduire en justice les auteurs de graves violations des droits humains ». A leur avis, « la création d'une Cour spécialisée mixte peut aider à briser
le cercle vicieux de violations et d'impunité en République démocratique du Congo ».
Le ministre Luzolo Bambi et l'ambassadeur itinérant des Etats-Unis en charge des crimes de guerre, Stephen Rapp, figuraient parmi plus de 100 participants à la
conférence qui comptait des membres du gouvernement congolais, des diplomates, des fonctionnaires des Nations unies, des représentants d'organisations internationales non gouvernementales, ainsi
que des représentants de la Société civile congolaise de chacune des onze provinces du pays.
Dans une correspondance adressée au Premier ministre Adolphe Muzito le 15 juillet 2011, 46 ONG congolaises et internationales ont affirmé que « la mise en place de
cette Cour mixte spécialisée est essentielle pour mettre un terme à la culture de l’impunité en RDC, où des atrocités continuent d’être commises chaque jour à l’encontre des populations civiles
».
« Après les mots et les promesses de + tolérance zéro +, le moment est venu pour le gouvernement de prendre des mesures concrètes à l’encontre des criminels,
en faisant voter cette loi », ont-elles souhaité.
Sanctionner les crimes les plus graves
Le projet de loi relatif à la Cour spécialisée s’inscrit dans la logique de « Tolérance zéro » à l’impunité et implique l’observance des valeurs essentielles sans
lesquelles aucune nation ne peut s’élever.
« En voulant protéger la vie, l’humanité tout entière a considéré que les atteintes les plus graves à la vie sont les crimes contre l’humanité, les crimes de
guerre et le génocide. Or, par rapport aux éléments de la loi sur la Cour spécialisée, le gouvernement considère qu’il n’y aura pas assez de +tolérance zéro+ à l’impunité dès lors qu’une société
n’est pas en mesure de sanctionner ceux qui ont commis ces graves violations », a expliqué le ministre Luzolo Bambi aux sénateurs.
Et d’interroger. « Quelle place donnons-nous à ces crimes dans notre arsenal répressif et quel traitement proposons-nous aux multiples victimes de ces infractions ?
».
Pour que les victimes de ces crimes ne se sentent pas oubliées, les parlementaires congolais ont le devoir de voter pour la loi créant cette Cour
spécialisée.
Cour spécialisée des droits de l’Homme
Sénat : Luzolo Bambi met l’accent sur la lutte contre l’impunité
Stéphane Etinga
Le Sénat réuni en séance plénière, le vendredi 12 août sous la direction de son président, Léon Kengo wa Dondo, a écouté les réponses du ministre de la Justice et
Droits humains. En fait, Luzolo Bambi est venu répondre aux préoccupations des sénateurs soulevées lors de la présentation du projet de loi portant création de la Cour spécialisée des droits de
l’Homme.
Nombreux sont les sénateurs qui, dans leurs interventions, n’ont trouvé aucune urgence pour la mise en œuvre de cette instance spécialisée des droits de l’Homme.
Pour eux, il faut plutôt réhabiliter les cours et tribunaux existants, doter le pays des tribunaux de paix partout où ils n’existent et ne fonctionnent plus, et améliorer les conditions de
travail des magistrats au lieu d’ajouter une cour de plus. Ils ont aussi estimé que les cours d’appel à travers le pays peuvent poursuivre les auteurs de violations des droits de l’Homme sans
recourir aux magistrats étrangers comme prévoit le projet de création de la cour spécialisée.
Vendredi, le ministre Luzolo Bambi a défendu ce projet de loi au nom du gouvernement en mettant l’accent sur quatre nécessités qui militent en faveur de l’adoption
de ce projet de loi, à savoir la lutte contre l’impunité ; l’indispensable travail de mémoire et de promotion de l’Etat de droit ; l’exigence de la sanction et de la réparation ; la légitimité de
l’implication de la communauté internationale en tant qu’elle est, dans ces affaires qui violent l’ordre public international et la conscience de l’humanité toute entière, au premier rang se
recrutent les victimes de ces violations graves du droit international humanitaire.
Djibu, un bébé provenant du viol
« Le projet que le gouvernement soumet à votre examen s’inscrit parfaitement dans cette logique », a déclaré le ministre de la Justice et Droits humains,
précisant aussi que cette logique est celle de « Tolérance zéro » à l’impunité. Dans ce cadre, le ministre a évoqué le cas malheureux d’une femme qu’il a rencontrée récemment à l’hôpital « Bon
Samaritain » à Goma et qui a crié sa rage sur les antennes de la radio Kivu One. Elle s’est retrouvée enceinte à la suite d’un viol collectif commis sur elle par 5 soldats rwandais des FDLR, à
deux reprises.
« De cette agression sexuelle est né un bébé à qui elle a donné le nom de Djibu, traduisez « quid ? », « quoi ? », « répondez ? », en français. En citant cet
exemple, le ministre a tenu à démontrer le bien-fondé du projet de loi portant la création de la Cour spécialisée des droits de l’Homme et son urgence. Dans ses explications, Luzolo Bambi a
précisé que les magistrats étrangers proviendront de la coopération et ne feront pas l’objet d’un traitement particulier ou d’une dépense financière spéciale.
Pour ce qui est du projet de loi portant promotion et protection des défenseurs des droits de l’Homme et des dénonciateurs d’actes de corruption et de détournement
des deniers publics en RDC, Périclès-Emmanuel Luzolo Bambi déclare que cette loi est d’importance capitale, dans la mesure où les défenseurs en question se retrouvent dans tous les secteurs
couverts par les droits de l’Homme, à savoir la première génération touchant les droits politiques ; la deuxième génération concernant les droits économiques, sociaux et culturels ; la troisième
génération visant les droits collectifs, sans oublier aussi les droits catégoriels tels que la promotion des droits de la femme, droit de l’enfant, des droits de la personne vivant avec handicap,
etc.