Créé l 15-12-2011- 02h43 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE | Mis à jour le jeudi 15-12-2011 02H48 AFRIQUE REDACTION PAR :Baudouin Amba Wetshi
Le chef de l’Eglise catholique au Congo-Kinshasa a décidé de «parler vrai» et de mettre fin à ce qui ressemblait fort à un louvoiement de la part des évêques du pays. Dans une déclaration publiée lundi 12 décembre, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya, archevêque de Kinshasa, n’est pas allé par le dos de la cuillère en contestant en des termes univoques la crédibilité des «résultats provisoires» de l’élection présidentielle annoncés par la Commission électorale nationale indépendante. La sortie médiatique du Cardinal intervient au lendemain de la publication du rapport du Centre Carter. L’homme a sans doute voulu être rassuré par des griefs analogues établis par d’autres missions d’observation.
Participant le dimanche 23 octobre dernier à une «célébration eucharistique festive» à la Basilique de Koekelberg, le Cardinal avait accordé un entretien à quelques
journalistes de la diaspora congolaise de Belgique. C’était à l’issue de cet office religieux. «L’Eglise catholique va déployer 30.000 observateurs, confiait-il. Ceux-ci vont travailler avec
d’autres observateurs.» «Ils iront dans tous les bureaux pour observer et informer la Conférence épiscopale». Laurent Monsengwo de conclure que la Conférence épiscopale des évêques du Congo
(Cenco) n’hésitera pas à «dénoncer» les cas éventuels de «tricheries massives». On peut comprendre la stupéfaction de l’opinion congolaise face à la posture prudentissime adoptée par les princes
de l’Eglise en réclamant la «vérité des urnes». Sans plus.
Lundi 12 décembre, «Monseigneur» a renoué avec l’exercice du ministère de la parole. «Dimanche 4 décembre 2011, écrit-il, la Cenco, dans une conférence e presse et
moi-même à l’Eglise Sainte Anne avons dans un appel demandé à la Ceni que soit proclamé la « vérité des urnes». Monsengwo de relever que les conclusions des observateurs de la Cenco et d’autres,
tant nationaux qu’internationaux, «posent sérieusement une question de crédibilité de cette élection, comme vient de l’attester le rapport du Center Carter». Cette Ong américaine estime que les
résultats provisoires publiés par la Ceni pèchent par un «manque de crédibilité».
Dans sa déclaration, le cardinal Monsengwo se montre plus tranchant et volontariste : «A l’analyse des résultats rendus publics par la Ceni ce vendredi 9 décembre
2011, il y a lieu réellement de conclure que ces résultats ne sont pas conformes à la vérité ni à la justice». A titre d’exemple, l’archevêque de Kinshasa de s’interroger sur le fait que le 6
décembre, Etienne Tshisekedi avait obtenu 5.927.728 voix sur 17.329.137 suffrages exprimés. Le même Tshisekedi n’avait plus que 5.863.745 voix, au 9 décembre, sur 18.144.154 suffrages. «Il perd
par conséquent 64.000 voix alors qu’on venait d’ajouter 34.000 bureaux…», souligne-t-il.
Habile, se gardant de verser dans le populisme, le Cardinal de conseiller aux personnes lésées de faire valoir leurs droits devant la Cour suprême de justice en
évitant tout recours «à la violence». Pour lui et sans doute pour l’ensemble de l’opinion congolaise, «dix-huit morts pour des élections, c’est trop!» Le prélat catholique conclut sa déclaration
en clamant la disponibilité de l’Eglise «à offrir son aide à la justice» afin que celle-ci puisse «établir la vérité des urnes» dans les bureaux de vote visités par les observateurs de
l’Eglise.
Lors de la messe organisée le 23 octobre à Bruxelles, Laurent Monsengwo Pasinya n’avait pas trouvé des mots assez durs pour tancer les gouvernants congolais. «La
politique doit promouvoir le bien commun, la solidarité et le sens du partage», déclarait-il dans son homélie. «Qu’avons-nous fait de notre pays et de notre société?», s’était-il interrogé en
regrettant que les pouvoirs publics congolais ne s’occupent pas assez des personnes précarisées qu’il a symbolisé à travers la métaphore de "la veuve et l’orphelin".
C’est un immense pavé que l’Eglise catholique a jeté, lundi 12 décembre, dans la mare. C’est un tournant. Les résultats provisoires publiés par la Ceni sont
désormais estampillés : «peu fiables». Les Anglo-Saxons diraient : «Unreliable». La Cour suprême de justice prendra-t-elle la redoutable responsabilité d’ignorer toute cette «clameur» émise par
les différents observateurs en maintenant, contre vent et marée, la proclamation des «résultats définitifs» prévue le 17 décembre?
Baudouin Amba Wetshi
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