Créé le 22 -04-2011 à 08h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE | RDC | Mis à jour le vendredi 22 -04-2011 09h00 | AFRIQUE REDACTION PAR : LE POTENTIEL
Le débat ouvert hier jeudi à l’Assemblée nationale sur le projet de loi modifiant et complétant la loi électorale de 2006 a été interrompu par l’annonce de la mort inopinée du député Jean Marie Kamoni, quelque temps après avoir présenté sa motion de procédure.
Les causes de son décès ne sont pas encore connues. Selon plusieurs sources, cet élu de Kisangani, suppléant d’Emile Bongeli, est décédé dans un hôpital de Kinshasa où il a été conduit d’urgence après s’être écroulé dans les couloirs de l’hémicycle.
La loi électorale modifiée propose un scrutin mixte combinant le système majoritaire et le proportionnel, le tout assorti d’un seuil d’éligibilité d’au moins 20 %. Ce qui fâche et divise les députés nationaux. Le texte porterait des germes de conflictualité en ce qu’il se rapprocherait un peu plus de la proposition de loi Tunda rejetée le 11 avril 2011 par la plénière de l’Assemblée nationale.
L’économie générale qui a présidé à l’élaboration de ce projet de loi modificative a été présentée à la plénière par le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et Sécurité, Adolphe Lumanu, qu’accompagnait le ministre des Relations avec le Parlement Richard Muyej. Cela après le rejet, le 11 avril dernier de l’initiative proposée par l’honorable Tunda Ya Kasenda sur la même matière.
Pour Adolphe Lumanu, les modifications apportées à la loi électorale de 2006, sont motivées notamment par la nécessité de favoriser le regroupement des forces politiques en vue d’un meilleur fonctionnement des Institutions, la prise en compte de la réduction du nombre de tours pour l’élection présidentielle et de la promulgation de certaines lois spécifiques, spécialement les lois relatives à la Commission électorale nationale indépendante (CENI), au Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC), et à la transformation des entreprises publiques en sociétés commerciales, établissements publics et services publics.
Le projet de loi propose des modifications et des innovations. Il s’agit, notamment, de l’introduction du mécanisme d’apparentement, l’instauration du mode de scrutin majoritaire uninominal pour les circonscriptions à un seul siège ou mixte pour l’élection des députés dans les circonscriptions comptant deux sièges ou plus pour les élections des assemblées délibérantes nationales, provinciales, urbaines et locales.
Le mode de scrutin mixte combine le scrutin majoritaire absolu et le scrutin proportionnel au plus fort reste. Quid ? La liste ouverte qui obtient la majorité absolue des suffrages remporte la totalité des sièges. Si elle n’obtient pas la majorité absolue, les sièges à pourvoir dans la circonscription sont répartis à la représentation proportionnelle selon la règle du plus fort reste au seuil de 20% des suffrages exprimés. Toujours dans les modifications, s’ajoute l’exigence de présenter une liste de candidats correspondant au nombre des sièges à pourvoir et l’introduction parmi les conditions d’éligibilité de l’obligation de produire une attestation fiscale des derniers exercices comme preuve de patriotisme et d’attachement au développement du pays.
En outre, le projet de loi propose l’érection de la commune en circonscription électorale en lieu et place du district pour la ville de Kinshasa, afin de faciliter, selon le gouvernement, le déroulement des opérations de vote et de dépouillement. Entre-temps, le chef de groupement est considéré comme membre du conseil de secteur.
Le texte dispense de l’obligation d’organiser des débats contradictoires radiodiffusés ou télévisés. Cette suppression est consécutive à la dernière révision constitutionnelle qui a adopté le scrutin à un seul tour pour l’élection présidentielle. Autres innovations, c’est l’actualisation du taux de la caution à payer par les candidats et la référence au Franc Congolais conformément à la règlementation en vigueur.
Des motions à l’émotion générale
Aussitôt l’économie du projet faite par le gouvernement, l’honorable Lumeya est monté au prétoire pour présenter une motion incidentielle en rapport avec le mode de scrutin. Selon lui, il s’agissait d’une question essentielle qui devrait être vidée au préalable avant tout débat. Avec l’avantage de gagner du temps. Sa motion a été tout de suite rejetée, au motif qu’elle ne respectait pas la procédure obligatoire en matière d’examen des propositions et des projets de loi telle que prévue dans le règlement intérieur.
Au nombre de ses contradicteurs, le député PPRD Jean Marie Kamoni ; celui-là même qui, dans les instants qui ont suivi son intervention, a piqué une crise et n’y a pas survécu alors qu’on le conduisait d’urgence à la Clinique Ngaliema. Le décès inopiné de Jean Marie Kamoni Mokota Lissa, a coupé net l’ambiance qui ravivait la salle des congrès du Palais du peuple suite à la succession des intervenants à la tribune commenter le texte soumis à l’examen de la plénière. Seule une dizaine des députés nationaux sur les 107 inscrits ont pu s’exprimer avant que l’annonce macabre ne vienne plonger tout le monde dans l’émoi.
Germes de conflictualité
Si jamais le projet de loi électorale sous examen à l’Assemblée nationale passait dans sa forme actuelle, il sera une source de conflits. C’est ce qu’indiquent beaucoup de spécialistes en la matière. Il s’agit particulièrement de la disposition relative au mode de scrutin. Le système de scrutin mixte, assorti de cette exigence d’un seuil d’éligibilité d’au moins 20 %, va ravaler le système proportionnel, qui, aux dires des experts serait le reflet de la volonté des électeurs.
Quant au concept seuil d’éligibilité, il tire son origine en Europe (Allemagne, Hongrie, Turquie). Dans ces pays, les partis politiques qui n’arrivent pas à obtenir un minimum de 5 % de suffrages à l’échelon de la circonscription électorale ou du pays, n’ont pas droit au siège. En Allemagne, il a été utilisé au départ pour limiter l’élection des groupes extrémistes de même que les partis les plus petits.
Le législateur serait-il animé de mêmes motivations ? Difficile à dire pour l’instant. Toutefois, l’instauration du seuil d’éligibilité accroîtrait le caractère non proportionnel dans la mesure où les votes en faveur des partis qui ne peuvent pas l’atteindre, mais devraient être représentés, constitueront du gaspillage pur et simple. En d’autres termes, des électeurs seraient allés aux urnes pour rien. Qu’est-ce à dire ? Plus le seuil d’éligibilité est élevé, plus le nombre de voix exprimées sont allées en pure perte.
Or, que constate-t-on dans le projet de loi présenté par le gouvernement ? Le taux de 20 % proposé est le plus élevé qui soit, un record mondial. Aucun pays ne l’a encore atteint. De quoi faire grincer des dents à des électeurs qui ne se retrouveraient pas dans les candidats présentés sur des listes gagnantes et des élus qui se contesteraient par rapport aux suffrages obtenus réellement par les uns et les autres.
Rien n’est encore gagné, rien n’est perdu non plus. Les débats sont ouverts à peine. La mouture votée fixera tout le monde et permettra à chacun de savoir à quoi s’en tenir.
(Le Potentiel)