Créé le 29 -04-2011 à 07h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE | RDC | Mis à jour le vendredi 29 - 04-2011 21 h00 | AFRIQUE REDACTION PAR : LE POTENTIEL
Encore une crise politique, une crise du plus grand parti politique de l’opposition, le MLC ; comme pour les crises des autres partis, faut-il en rire ou en
pleurer? Pourquoi des crises à répétition et à qui profitent-elles? N’est-ce pas là le plus grand mal politique qui explique l’impossible démocratique congolais de Kabuya Lumuna et qui justifie
l’immobilisme politique et institutionnel ?
En effet, en dépit de toutes les apparences et malgré l’engagement apparemment déclaré des uns et des autres à réussir la tenue de prochaines échéances électorales,
la démocratie congolaise se porte mal; elle serait malade et on doit dire très malade. Et s’il ne s’était agi que d’une simple fièvre ou de la grippe, on pouvait en rire; mais la démocratie
congolaise serait atteinte d’un mal grave, d’un cancer qui en serait à la métastase, un mal de croissance endémique qui ruine l’espérance générale en un avenir institutionnel congolais certain.
Ce mal, c’est celui de lutte d’ambitions certes légitimes mais de divisions et de querelles partisanes qui surviennent généralement autour des enjeux politiciens de positionnement et de
leadership. Pour être une démocratie bureaucratique née à partir du partage du pouvoir ou de la distribution des responsabilités d’Etat alors qu’ailleurs en Amérique et en Europe les partis
politiques sont nés de la nécessité de rationaliser les batailles politiques et électorales.
La démocratie congolaise des partis politiques est bureaucratique parce qu’elle n’est démocratique qu’à partir de l’existence plurielle ou multipartite des partis
qui n’auraient du parti que le nom et les élections ne conditionnent ni la santé politique ou économique des partis encore moins leur cohérence idéologique. Elle n’est pas le reflet des
dynamiques ou des problèmes de société mais plutôt de structures de positionnement et de clientélisme généralement inspirés et institués pour servir les ambitions égoïstement individuelles de
leurs créateurs. Ils ne sont pas de machines à faire gagner des élections; ils ne sont pas de laboratoires d’idées, de doctrines ou d’opinions de direction de l’Etat ou du gouvernement de la
nation. Soit ce qu’un spécialiste américain a qualifié à leur début aux années 1960 de Clubs d’amis, la classe politique elle-même lui étant apparue à l’époque comme une simple clique politique.
La démocratie congolaise serait malade de cette clubisation amicale et de cette manie de clique politique qui à chaque génération et à chaque fois que l’on pense enfin que la politique va dominer
les caprices de la nature et la volatilité de la vie brise le navire en morceaux et oblige la nation à des éternels recommencements. Cette maladie aura été inventée pour empêcher à la nation
congolaise d’être une force et de manquer à jamais de force politique qui revendique comme partout ailleurs la direction responsable devant l’histoire et de devenir un Etat fort et une nation
puissante, une puissance africaine
Sinon comment peut-on nous expliquer qu’un parti comme le Mouvement de Libération du Congo (le MLC) en dépit de ses origines militaires et étrangères puisque
fortement liées au contexte régional et aux prétentions au leadership de Museveni l’ougandais choisisse de s’affaiblir juste au moment où l’opinion nationale pensait et s’attendait à voir ses
dirigeants confirmer l’élan de 2006 et capitaliser le nouveau contexte politique national d’une opposition enrichie par l’implication de l’Union pour le Progrès et la Démocratie Sociale (UDPS) ?
Quelle serait cette pesanteur? cette perte qui atteint tous les animaux malades de la politique? Beaucoup de 42% des électeurs des présidentielles de 2006 se réjouiraient-ils ? Et leurs
adversaires ne devraient-ils pas s’en inquiéter?
Comment les leaders de ce parti qui comptent parmi les meilleurs de l’élite politique ont-ils pu oser plonger de cette basse façon dans la mêlée confirmant dans la
foulée que les partis politiqués au Congo démocratique sont des boutiques de ceux qui les créent et qu’en principe on devrait n’y adhérer qu’en se clientélisant et en se disponibilisant à
travailler au triomphe des ambitions des fondateurs, qui, du reste, ne sont pas tous des sociétaires, mieux des actionnaires majoritaires? Et puis, qui a dit que les partis politiques sont des
entreprises de survie des structures de la débrouille? On aurait dû fermer les yeux et s’en remettre à la fatalité parce que c’est désormais cela la réalité de la politique congolaise s’il n’y
avait eu que le MLC dans ces mauvais draps. L’UDPS, on le sait, est aussi un tigre en papier et non un vrai colosse parce que déchirée par des querelles de leadership. On l’a déjà déploré pour le
Palu avec la mise à l’écart de Thérèse Pakassa et l’on sait que la reconfiguration de la majorité présidentielle tiendrait aussi en partie à l’absence d’unité et de cohérence stratégique entre
sociétaires multiples unis par leur volonté d’accompagner au triomphe le leadership du Chef de l’Etat, encore que celui-ci peut y parvenir autrement que par cette vaste plateforme.
Le mal étant général et puisqu’il plonge ses racines loin dans l’histoire de notre décolonisation, il faut que tous comprennent que les difficultés éprouvées
jusqu’ici à construire l’indépendance ainsi que la désormais culture insurrectionnelle qui donne ses marques à la politique congolaise seraient dû à l’absence de la part de l’élite politique de
la volonté à dominer par politique les mauvaises conjonctures et surtout ces tendances générales et erratiques de l’histoire politique nationale.
Pouvons-nous nous en sortir? Bien sûr que oui, la République Fédérale d’Allemagne nous servirait en cela d’exemple parce que là-bas les partis politiques ne sont
pas de propriétés privées de leurs fondateurs ; ce sont des biens publics et pour cette raison, les partis politiques allemands ont été constitutionnalisés. Seule la constitutionnalisation des
partis politiques en RDC permettra de nous faire échapper des abus et des utilisations personnelles des talents et de la ferveur patriotiques des sociétaires. L’économie politique générale faite
des partis politiques en RDC est une économie du gaspillage d’énergies et de ressources. Le second remède serait celui d’une réforme, d’une loi de partis anti-émiettement, anti-division qui
impose des partis à base populaire et des partis politiques ouverts comme en Allemagne et aux USA. Une loi de réforme qui bannisse l’existence des partis politiques propriété personnelle des
individus, de familles ou de clans et impose; des partis politiques propriété nationale et à base régionale ou locale. Les partis démocrates et républicains américains sont des partis à base
locale et ouverts au leadership de chacun et de tous. Si le parti démocrate américain était un parti comme ceux de chez nous, Barack Obama ne serait jamais devenu président de la République. Nous
n’avons pas de choix si nous voulons tirer la démocratie électorale congolaise de sa misère.
Ce que les partis politiques congolais doivent être dépend du type de société dans laquelle nous voulons vivre; parce que dans une société plurielle, l’avenir, la
paix sont au prix de la solidarité, de la cohésion et par conséquent de l’union de coeur et d’esprit. L’union qui fait la force se construit autour de la défense de l’idée de la nation ou de la
République qu’un parti politique est censé incarné et non sur de convenances ou des calculs très politiciens d’abuser de la bonne foi des partenaires. Réformer les partis politiques, c’est les
libérer de leur emprisonnement, de leur étouffement par les ambitions parfois mal assumées de plus prétentieux d’entre nous.
Le fait que l’opposition institutionnelle ait été empêchée d’avoir un porte-parole simplement parce que l’autonomie des structures que sont les partis se
confondaient avec la particularité des charismes de leurs dirigeants montre si besoin combien pareille conception de parti est un danger pour la démocratie.
La démocratie a besoin de démocrates et la République des républicains; mais la démocratie et la République congolaises souffriraient du mal de l’absence de
démocrates et des républicains. Pouvons-nous emprunter ailleurs à la culture politique française où l’orgueil des élites politiques est dans la revendication de la qualité d’homme d’Etat plutôt
que d’homme politique?
Nos hommes politiques peuvent-ils gagner à apprendre l’altruisme plutôt qu’à cultiver leur égo? Comment chez nous nos politiques échouent-ils à se hisser haut sur
les cimes de l’espérance populaire d’un leadership désintéressé et au service des idéaux communautaires et pour souvent laisser chavirer les navires qui par moment embarquent l’espérance de tout
un peuple?
Il est venu le temps de passer d’un leadership patrimonialisé et finalement tribalisé quand il n’est pas simplement corpotisé pour des leaderships patriotique et
service à la nation. Je ne suis pas un malheureux sympathisant du parti aujourd’hui en crise. Mais son poids politique devrait suffire à interpeller tous les patriotes.
DR. PR. PHILIPPE BIYOYA MAKUTU KAHANDJA, politologue