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Stratégie d’intégration en R.D.C ?

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Créé le 22-02-2011 à14 h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |   ACTUALITE | RDC | Mis à jour le mardi 22 -02-2011 à  16 h10 | PAR : LE POTENTIEL

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ABSTRACT

Regional integration and the creation of the African common market has been the vision of African leaders since the early years of independence. Despite some gains, there are still a number of challenges facing the integration process. Even though the African Union only recognizes eight regional economic communities (RECs), the continent currently has fourteen inter-governmental organizations, working on regional integration issues. Overlapping memberships in RECs create unhealthy multiplication and duplication of efforts and misuse of scarce resources. This paper is interested not only in finding out rational explanations for the belonging of the DRC to four different regional groupings, but also in reflecting on a realistic scheme of regional economic integration in this Central African country.

1. INTRODUCTION


C’est à la création de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) en 1963 que remonte le dessein des « pères fondateurs » d’unifier politiquement et économiquement le continent africain. Le projet d’intégration économique a fait l’objet successivement du Plan d’Action de Lagos (1980), du Traité d’Abuja (1991) et même du Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD), lancé en 2001. Succédant à l’OUA en 2001, l’Union africaine (UA) a repris à son compte le projet de création d’une communauté économique africaine à l’image du modèle d’intégration économique réussie en Europe. Cependant, la responsabilité principale de la mise en œuvre de ce vaste dessein incombe aux Communautés Economiques Régionales (CER) et à leurs États membres. Une étape intermédiaire vers la réalisation de cet objectif est la transformation des CER en unions douanières, puis en unions monétaires sous-régionales avant la mise en place d’une banque centrale commune et d’une monnaie unique à l’horizon 2021.

Dans cette perspective et conformément à l’esprit de l’Article 44 du Traité d’Abuja, l’Association des Banques Centrales Africaines a adopté, en septembre 2002, un Programme de Coopération Monétaire en Afrique (PCMA) à l’effet d’aider les Etats membres à harmoniser leurs politiques monétaires, financières et de paiement, et intensifier le commerce intra-communautaire de biens et services. La mise en œuvre du PCMA se fera en quatre phases, eu égard aux critères de convergence macroéconomique que les pays membres se doivent de réaliser comme préalable à l’avènement de la monnaie unique.

L’Afrique compte à ce jour 14 CER distinctes. Paradoxalement, plusieurs pays se caractérisent par leurs multiples appartenances aux groupements sous-régionaux existants. De ces 14 CER, l’UA n’en reconnaît formellement que 8 et entend ramener définitivement leur nombre à 5 afin de faciliter le processus même d’intégration économique. Dès lors, il est attendu de chaque Etat membre de l’UA de n’appartenir qu’à une seule CER. La République Démocratique du Congo est membre, non seulement de quatre groupements économiques sous-régionaux différents, mais également du Programme de Coopération Monétaire en Afrique par le biais de la Banque Centrale du Congo. De ce fait, elle est donc soumise à l’observance de critères de convergence macroéconomique à deux niveaux, à savoir : au niveau des CER et dans le cadre de l’exécution du PCMA.

Deux questions fondamentales sont soulevées dans cet article. Primo, la République Démocratique du Congo peut-elle être en phase avec les différents critères de convergence macroéconomique qui lui sont assignés ? Secundo, à quel groupement sous-régional doit-elle objectivement appartenir pour bénéficier pleinement du processus d’intégration économique et monétaire en cours ? Ces questions sont d’autant opportunes que la RDC vient de marquer avec un certain éclat médiatique sa rentrée sur la scène économique continentale1. En vue de répondre au questionnement précédent, il est fait état, dans ce qui suit, d’abord du niveau de l’intégration économique en Afrique, puis du degré de réalisation des critères de convergence macroéconomique en RDC, et enfin de la proposition d’une voie d’intégration susceptible de maximiser les chances de réussite de ce processus en RDC.

2. INTEGRATION ECONOMIQUE REGIONALE EN AFRIQUE: UN ETAT DES LIEUX

Un mécanisme d’intégration régionale est un accord préférentiel entre un groupe de pays, visant à réduire les obstacles aux transactions économiques et non économiques entre ces pays. Ce mécanisme peut revêtir des formes aussi diverses que la zone de libre-échange, l’union douanière, le marché commun et l’union économique. En principe, dans la plupart des cas d’intégration régionale, les pays commencent par supprimer les obstacles aux échanges entre eux, pour ensuite introduire progressivement des mécanismes plus ambitieux.

La question centrale qui intéresse les économistes est celle de l’impact effectif de l’intégration régionale sur le bien-être, sur la modification de la structure tant de consommation que de production des pays membres ainsi que sur les flux d’investissements directs entre ces pays eux-mêmes et en provenance de l’étranger. Les accords régionaux de commerce sont une forme particulière de libéralisme commercial comportant un aspect discriminatoire. La constitution d’une union douanière, par exemple, peut avoir des effets de création et de détournement de commerce dans les pays membres. Etant donné que les firmes faisant partie d’un processus d’intégration pourront avoir accès à un marché plus vaste, une analyse complète de l’intégration se doit également de considérer l’impact de celle-ci sur le degré de concurrence, les marges et les prix pratiqués ainsi que sur les gains dynamiques sous forme d’une innovation accrue de la part des firmes ainsi mises en concurrence2.

Evaluant le mouvement d’intégration économique en Afrique3, la Commission Economique pour l’Afrique soutient que l’intégration et la coopération régionale peuvent, en effet, aider les pays africains à remédier à la taille réduite des marchés nationaux, stimuler la concurrence entre pays membres, mobiliser davantage des ressources d’investissement, favoriser le partage de connaissances et la mise en commun de certaines ressources (par exemple les cours d’eau), promouvoir la paix et la sécurité, accroître la capacité collective de négociation et la visibilité dans les arènes internationales. En dépit de différences en matière de dotations en ressources, les pays africains pourraient exploiter utilement leurs avantages comparatifs, joindre leurs compétences et concevoir des solutions communes à l’allocation des ressources.

L’Afrique compte à ce jour 14 Communautés Economiques Régionales distinctes, avec 3 à 4 CER en moyenne dans chacune des cinq régions naturelles du continent : le Centre, l’Est, le Nord, l’Ouest et le Sud, comme l’indique le tableau 1 ci-après. Il est à noter en particulier que le Marché commun de l’Afrique orientale et australe – le COMESA – est à cheval entre trois régions : l’Afrique australe, l’Afrique de l’Est et l’Afrique du Nord. Paradoxalement, plusieurs pays africains appartiennent à la fois à une multitude de groupements économiques sous-régionaux, un phénomène qui est connu sous l’appellation de « the spaghetti bowl » illustré dans la figure reprise en annexe.

Pourquoi un pays tiendrait-il à être membre dans plusieurs organisations sous-régionales ? Les raisons les plus immédiates et susceptibles d’expliquer l’adhésion à une communauté donnée sont : la proximité géographique, l’interdépendance économique, une culture ou une langue commune, des relations de coopération historiques et le partage des ressources communes. A cela, peuvent s’ajouter des raisons politiques et sécuritaires. Plus subtilement, ce serait aussi une question de positionnement stratégique. Des pays se livreraient ainsi à une certaine « géométrie variable » en fonction de circonstances du moment. Autrement dit, appartenir à plusieurs CER donne la possibilité d’une part de maximiser le bénéfice découlant du dynamisme de certains groupements et, d’autre part, de se désengager éventuellement des organisations les moins performantes. D’après une enquête de la Commission Economique pour l’Afrique4, les raisons invoquées par les pays pour rejoindre les CER sont par ordre d’importance : politiques et stratégiques (50%), économiques (35%), géographiques et historiques (10%) ainsi que culturels (5%),.

L’appartenance à plusieurs CER n’est pas sans inconvénients en termes d’efforts et d’argent. Les pays membres se prêtent malgré eux à un nombre croissant d’obligations : paiement des cotisations, participation aux réunions incessantes à divers niveaux, adoption et ratification des protocoles d’accords, etc. En outre, les pays concernés s’exposent à la duplication, au chevauchement et à l’incohérence des programmes sous-régionaux ; ce qui est de nature à diminuer l’efficacité de ces programmes ou à ralentir le processus même d’intégration économique. A ce sujet, Il a été constaté que, sur une échelle allant de 0 à 1, le non-paiement des cotisations apparaît comme le problème fondamental de la paralysie des CER, suivi par la faible exécution des programmes.

Comme indiqué plus haut, la transformation des CER en unions douanières constitue une étape intermédiaire vers la réalisation de l’objectif principal visé par l’Union africaine, à savoir : la création d’une communauté économique africaine. Quelques progrès ont été accomplis en matière de facilitation et de libéralisation des échanges notamment au sein de l’UEMOA et du COMESA, de la libre circulation des personnes au sein de la CEDEAO et du développement des infrastructures dans les pays de la SADC. La Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) s’est transformée en union douanière en janvier 2005. Le COMESA vient de lancer son union douanière lors du Sommet des chefs d’État tenu en juin 2009 au Zimbabwe, tandis que la SADC envisage de mettre en place son union douanière en 2010. Cependant, dans bien des cas, tous les pays n’ont pas abaissé les tarifs aux niveaux envisagés par leur CER. Certains pays en sont toujours à la mise en œuvre de réductions tarifaires qui auraient dû être effectuées depuis longtemps5. Sur la base d’indices d’intégration élaborés par la Commission Economique pour l’Afrique6, les CER ont été classées en cinq groupes au regard de leurs performances observées en 1994-1999 :

- performance au-dessus de la moyenne (6% et plus) : l’UEMOA, la CEDEAO et la SADC;

- performance moyenne (entre 4% et 6%) : la CEMAC, la CEN-SAD et la CEEAC;

- performance proche de la moyenne (entre 2% et 4%) : l’EAC, l’IGAD et le COMESA;

- stagnation (2% et en-dessous), l’UMA ;

- performance erratique : la CEPGL, l’IOC et le MRU.

Des données plus récentes confirment que la CEN-SAD, la CEDEAO, le COMESA et la SADC sont les quatre CER les plus performantes en termes d’exportations et d’importations intracommunautaires.

De nombreux obstacles subsistent certes au développement des échanges intercommunautaires en Afrique liés aux facteurs tels que des structures économiques assez semblables, la faiblesse des infrastructures, l’étroitesse des marchés financiers et des capitaux, l’incapacité à mettre en œuvre les protocoles commerciaux, des systèmes de paiement et d’assurance embryonnaires, l’inconvertibilité des monnaies7. Mais il apparaît, d’après les données du tableau 2 ci-dessous, que les échanges intra-africains hors CER ont progressé plus vite que ceux de l’Afrique avec le reste du monde. Autrement dit, l’Afrique s’ouvre davantage au commerce avec elle-même bien au-delà des espaces créés par les CER.

Tablant sur le modèle de l’union monétaire européenne, plusieurs CER ont adopté des critères de convergence macroéconomique pour encourager les Etats membres à harmoniser davantage leurs politiques monétaires et budgétaires. Tel est le cas de la CEDEAO, de la CEMAC, du COMESA, de l’EAC, de la SADEC et de l’UEMOA. Les communautés qui sont déjà érigées en unions monétaires – telles que la CEMAC et l’UEMOA, au sein desquelles circule le franc CFA – affichent généralement de bons comportements en matière d’objectifs de réduction de l’inflation, des déficits budgétaires et de l’endettement extérieur. Ces objectifs figurent souvent parmi les critères dits « de premier rang ». D’autres critères « de second rang » se rapportent notamment au taux de croissance réelle, au montant de la masse salariale, de l’investissement public et des recettes fiscales ainsi qu’à la stabilité du taux de change réel. Bien qu’il y ait des performances divergentes au niveau des CER, l’indice d’intégration monétaire et financière s’est amélioré dans l’ensemble au cours de la période 1994-1999, couverte par une étude de la Commission Economique pour l’Afrique8.

3. LA R.D.C. DANS LES MOUVANCES ECONOMIQUES SOUS-REGIONALES

De par sa situation géographique, la République Démocratique du Congo est le seul pays en Afrique qui partage ses frontières avec 9 autres Etats voisins : l’Angola, le Burundi, le Congo-Brazzaville, la République Centrafricaine, l’Ouganda, le Soudan, le Tchad, le Rwanda, et la Zambie. Singulièrement, cet immense territoire est à la fois un atout au plan externe et un handicap au plan interne. Tchad

Comme atout, la RDC a l’avantage précisément d’être au cœur de l’Afrique et donc à la croisée de plusieurs influences et possibilités de rayonnement vers différentes régions du continent. Comme handicap, ce pays est un « espace écartelé »9 entre trois ensembles économiques faiblement intégrés entre eux mais adossés à des mouvances d’échanges extérieurs, à savoir :

- la mouvance de l’Afrique australe dans laquelle s’insèrent les provinces du Katanga et des deux Kasaï;

- la mouvance de l’Outre-mer et de l’Afrique centrale qui intéressent la capitale Kinshasa et les provinces du Bas-Congo et de l’Equateur; et

- la mouvance de l’Afrique orientale dans laquelle s’inscrivent le grand Kivu et la Province Orientale.

Ces traits géographiques expliquent sans doute que la RDC puisse appartenir à quatre communautés économiques régionales : la CEEAC, la CEPGL, le COMESA et la SADC. Des considérations d’ordre politique et sécuritaire fondent également l’appartenance initiale de la RDC à la CEPGL et son récent retour au sein de celle-ci, après une longue période d’inactivité de cette communauté économique régionale. C’est aussi le cas de l’attachement que la RDC manifeste à l’égard de la SADC dont l’appui militaire de deux pays membres – le Zimbabwe et la Namibie – a été très déterminant dans le conflit armé qui l’opposait au Rwanda et à l’Ouganda, en 1998-1999. Sur le plan diplomatique, l’Afrique du Sud a pesé de tout son poids pour faire aboutir les processus de paix et de démocratisation, notamment en organisant sur son sol l’essentiel des négociations entre les belligérants et en finançant en partie les élections présidentielle et législatives en 2006.

Les données du tableau 4 ci-dessous montre que la RDC a été moins performante en matière d’intégration économique, au regard de l’évolution de son indice global d’intégration ainsi que du rang qu’elle occupe à cet effet au sein de chacune des CER où elle est membre.

La SADC et le COMESA figurent parmi les CER les plus performantes en Afrique, comme déjà indiqué plus haut. Au sein de la SADC, l’Afrique du Sud s’est arrogé 64% des exportations intracommunautaires, en 2000-2007. Pour ce qui est du COMESA, 81% des exportations proviennent des pays suivants : Kenya (29%), Libye (15%), Égypte (13%), Zambie (11%), Zimbabwe (8%) et Ouganda (6%). Au chapitre des importations, l’Afrique du Sud et l’Angola ont réalisé respectivement 69% et 9% des importations totales de la SADC. Pour le COMESA, il s’agit de l’Égypte (45%), de la Libye (12%) et du Kenya (9%).

Certains auteurs considèrent que le processus d’intégration régionale risque d’être fragilisé si les pays membres n’ont pas le même niveau de développement économique. Par exemple, au sein de la SADEC, il y a d’énormes disparités : « D’un côté le Mozambique, le Malawi et la Tanzanie font partie des sept pays les plus pauvres du monde ; de l’autre, l’Ile Maurice et l’Afrique du Sud sont en passe d’entrer dans la catégorie des pays industriels. Seule l’Afrique du Sud dispose d’un marché intérieur suffisamment grand, et au pouvoir d’achat suffisamment élevé, pour que les investissements directs dans les secteurs des biens de consommation et des biens d’investissement y soient jugés rentables »10.

La réussite du processus d’intégration régionale dépend dans une grande mesure du degré d’harmonisation des politiques économiques des pays membres, notamment en matière de tarifs, de taux d’inflation, de taux de change, de ratios de la dette publique, etc. La réalisation de la stabilité macroéconomique et de la convergence des agrégats macroéconomiques clés est une condition nécessaire pour la création d’une union monétaire. De toutes les CER auxquelles appartient la RDC, il n’y a que la SADC et le COMESA qui envisagent explicitement de mettre en circulation à terme une monnaie unique à l’usage de leurs Etats pays. De ce fait, elles ont édicté une série de critères de convergence macroéconomique devant être remplis préalablement à la création de leurs zones monétaires respectives. Par contre, au sein de la CEEAC, hormis la République Démocratique du Congo et Sao-Tomé et Principe, les autres pays membres font partie déjà de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). Néanmoins, ils sont tous soumis au respect des critères de convergence macroéconomique applicables dans le cadre du Programme de Coopération Monétaire en Afrique (PCMA).

Les critères de convergence macroéconomique sont généralement éclatés en critères de « premier rang » et critères de «deuxième rang », selon l’importance qui leur est accordée dans le cadre du COMESA, du PCMA et de la SADC. La réalisation des critères est différemment modulée dans le temps. Pour des raisons de comparaison, le tableau 5 n’a retenu que sept critères applicables à l’horizon 2008-2012.

En ce qui concerne les critères de convergence macroéconomique, les performances annuelles moyennes de la RDC, en 2003-2008 par exemple, étaient globalement inférieures à celles des autres pays membres de la CEMAC, du COMESA et de la SADC comme le renseigne le tableau 6 ci-après.

Source des données : FMI, Perspectives économiques régionales. Afrique subsaharienne, octobre 2009.

Quoique faisant partie avec la RDC et Sao-Tomé & Principe de la même sous-régionale dans le cadre du PMCA, les pays de la CEMAC affichent généralement de meilleures résultats que la RDC et Sao-Tomé & Principe qui ont des monnaies autonomes. Autrement dit, l’appartenance à une zone monétaire contraint en quelque sorte les Etats membres à plus de discipline en matière de gestion monétaire et financière, comme le montrent leurs scores de réalisation sur les 11 critères de convergence PMCA, au tableau 7 ci-dessous.

4. VERS QUELLE STRATEGIE D’INTEGRATION REGIONALE EN RDC ?

Les Communautés Economiques Régionales étant le fer de lance du processus d’intégration économique, l’Union africaine et le NEPAD ont proposé de ramener leur nombre de 8 à 5 pour permettre l’atteinte de l’objectif ultime de création d’une zone monétaire unique en l’an 2021 à partir des CER suivantes :

- en Afrique du Nord : l’Union du Maghreb Arabe (UMA) avec 5 Etats ;

- en Afrique de l’Ouest : la Communauté Economique pour le Développement Economique de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) autour de 15 Etats pour 342,5 millions d’habitants ;

- en Afrique Centrale : la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) devant desservir 11 Etats pour 121,2 millions d’habitants ;

- en Afrique de l’Est : le Marché Commun de l’Afrique Orientale et Australe (COMESA) qui comprendrait seulement 10 Etats pour environ 260 millions d’habitants ;

- en Afrique Australe : la SADC qui n’aurait plus que 12 Etats membres pour 172 millions d’habitants.

En somme, les principaux changements proposés concernent le COMESA et la SADC dont la double appartenance de certains Etats a été supprimée. Contrairement aux autres régions où il y a une évidente cohérence géographique, le COMESA présente actuellement des frontières de l’intégration économique couvrant à la fois l’Afrique orientale, l’Afrique australe, l’Afrique centrale ainsi que l’Océan indien, ce qui ne serait pas viable. En effet, le souhait est d’avoir, dans chaque CER, au moins un pays « leader » susceptible d’impulser l’intégration économique régionale à l’image de ce qui fut observé dans l’Union européenne. Ainsi, on aurait le Nigéria et la Côte d’Ivoire pour la CEDEAO, le Cameroun et la RDC pour la CEEAC, l’Egypte et le Kenya pour la COMESA, et l’Afrique du Sud pour la SADC. D’après ces propositions, la République Démocratique du Congo ne devrait appartenir qu’à la CEEAC en vertu, visiblement, du critère géographique. Est-ce suffisant ?

La question ainsi posée ne manque pas d’intérêt, comme l’atteste ce point de vue du gouverneur de la Banque Centrale du Congo : « Il faudrait que nous poussions choisir à quelle Afrique nous voulons appartenir, notamment pour réaliser les objectifs d’union monétaire et douanière posés par l’Union africaine, en nous appuyant sur (notre) situation géographique au centre du continent…Il faut donc choisir entre une appartenance pleine à la CEEAC ou la SADC »11.

L’intégration monétaire est un puissant facteur de soutien des échanges commerciaux pour autant que l’usage d’une monnaie commune comporte des avantages en termes de réduction des coûts de transaction et de discipline collective en matière de gestion monétaire et budgétaire. Cependant, outre la perte de sa souveraineté, lors de l’abandon de sa monnaie, « un pays renonce aussi à un instrument de sa politique économique, c’est-à-dire que ce pays perd sa capacité à conduire une politique monétaire nationale »12. D’après la théorie des zones monétaires optimales, ces coûts peuvent être minimisés si l’économie jouit d’une certaine flexibilité lui permettant de réagir à des chocs asymétriques par le biais notamment de la mobilité du facteur travail, de l’ajustement des salaires et des prix ainsi que des transferts fiscaux. Cependant, une telle éventualité dépend du degré de similarité entre les structures de production et d’exportation d’un pays et celles de ses partenaires dans l’union monétaire.

D’après le gouverneur Masangu Mulongo : « A long terme, le Congo, en toute objectivité, devrait être l’Etat moteur de la zone Afrique centrale, par ailleurs déjà homogène d’un point de vue monétaire. En revanche, ses intérêts à court terme le poussent davantage vers les pays de la SADC, plus dynamique d’un point de vue économique… Il est tout à fait envisageable pour le Congo de continuer pour un temps de s’arrimer au dynamisme de l’Afrique australe…avant de rejoindre pleinement l’Afrique centrale »13. C’est bien là une position qui ne tranche pas clairement sur la question du choix unique qu’exige l’Union africaine de ses Etats membres. Le maintien de la CEEAC dans la course ne serait justifié que par le fait que c’est vers elle que nous portent naturellement des critères linguistiques, culturels et géographiques.

Nous estimons que l’appartenance à la zone SADC plutôt qu’à la CEEAC peut être réellement bénéfique à la RDC du fait de la présence, d’une part, de nombreux autres pays qui sont dotés de ressources minières (et donc présentant une certaine similarité de réaction aux chocs exogènes comme celui de la récente crise financière internationale14) et, d’autre part, de la présence de l’Afrique du Sud qui est dotée d’une économie plus diversifiée que celle de la RDC. Ce qui présente des possibilités de complémentarité pouvant attirer des investissements directs étrangers en RDC. Les investisseurs sud-africains tels qu’Anglo-American, De Beers, Stanbic Bank, Engen, Vodacom y sont des « précurseurs très actifs » et susceptibles de servir d’exemples à bien d’autres. Enfin, l’appartenance à la SADC offre sûrement un vaste marché potentiel pour l’exploitation des économies d’échelle, un marché qui pourrait s’étendre bien au-delà de l’Afrique australe. En effet, lors du premier sommet tripartite COMESA-CAE-SADC, tenu à Kampala en octobre 2008, les chefs d’État ont exhorté les trois communautés économiques à créer une zone de libre-échange unique et à lancer le processus de fusion en une seule CER, pour ainsi contribuer à la mise en place rapide de la communauté économique africaine. Il faut cependant que la volonté politique aille au-delà de la simple rhétorique pour que les perspectives précitées se concrétisent.

FRANÇOIS KABUYA KALALA ET TSHIUNZA MBIYE

Kinshasa, mai 2010.

Annexe : «The spaghetti bowl » ou l’appartenance multiple des pays africains aux Communautés Economiques Régionales

Source : ECONOMIC COMMISSION FOR AFRICA.

(Footnotes)

1 La RDC a assumé à Kinshasa successivement : la présidence de la 33ème session ordinaire de l ’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA), le 21août 2009; la présidence du 29ème sommet de la Communauté de Développement de l ’Afrique Australe (SADC), du 7 au 8 septembre 2009; et la présidence du 14ème sommet de la Communauté Economique des Etats de l ’Afrique Centrale (CEEAC), le 24 octobre 2009.

2 Voir MUCCHIELLI, J.-L. et MAYER, T., Economie internationale, Paris, Dalloz, 2005, p. 407-421.

3 ECONOMIC COMMISSION FOR AFRICA, Assessing Regional Integration in Africa , Addis Addis Ababa, 2004.

4 ECONOMIC COMMISSION FOR AFRICA, Assessing Regional Integration in Africa II. Rationalizing Regional Economic Communities , Addis Ababa, 2006.

5 Voir COMMISSION ECONOMIQUE POUR L ’AFRIQUE, « Prise en compte de l’intégration régionale au niveau national », E/ECA/CTRCI/6/7, 27 juillet 2009.

6

7 MARTIN, S., « Les Communautés Economiques Régionales au sein du NEPAD. Quelles perspectives pour un développement durable en Afrique ?», Conférence Economique Africaine, Addis-Abéba.

8 ECONOMIC COMMISSION FOR AFRICA, Assessing Regional Integration in Africa, Addis Ababa, 2004, p. 116.9 Expression empruntée à BRUNEAU, J. et SIMON, Th., Zaïre : Espace écartelé, Kinshasa, Bureau d’Etudes et d’Aménagement Urbain (B.E.A.U.), 1991, p. 10.

10 Lire MARX, M. T. et PETERS-BERRIES, « SADC : les difficultés de l’intégration régionale », D+C Développement et Coopération, n° 2, mars-avril 1998, p. 16-23.

11 MASANGO MULONGO, J.-C., Pourquoi je crois au progrès de l’Afrique. Credo d’un banquier africain, Paris, Prestige Communication, 2009, p. 140-141.

12 DE GRAUWE, P., Economie de l’intégration monétaire, Bruxelles, De Boeck Université s.a.,p. 12.

13 MASANGU, M. J.-C., op. cit., p. 142-143.

14 Voir SOUTHERN AFRICA RESOURCE WATCH (SARW), Impact of the Global Financial Crisis on Mining in Southern Africa, Johannesburg, 2009. L’Afrique australe compte comme pays miniers : le Botswna, le Malawi, la Namibie, la République Sud-Africaine, la Zambie et le Zimbabwe; tandis que dans la CEMAC, plusieurs Etats membres sont producteurs de pétrole (Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad).


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