Créé le 17 -06-2011 à 09h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE | RDC | Mis à jour le VENDREDI I 17- 06-2011 | 17h59| AFRIQUE REDACTION PAR : LE POTENTIEL
La Cour militaire de Gombe, qui siège sur le procès Chebeya, s’est encore donné une semaine pour rendre son verdict. Prévu pour hier jeudi 16 juin 2011, c’est à
quelques minutes de l’ouverture de l’audience que la décision du report a été annoncée à l’assistance, médusée et désabusée en même temps. Dans le procès Chebeya, la vérité se fait toujours
attendre.
Annoncé pour le jeudi 16 juin 2011, le verdict sur le procès Chebeya n’est pas tombé. La Cour militaire de Gombe qui siège depuis novembre 2010 sur le double
assassinant de Floribert Chebeya et de son chauffeur, Fidèle Bazana, prend son temps. Elle s’est rétractée en dernière minute, promettant de clore définitivement l’affaire le jeudi 23 juin.
Raison évoquée : l’indisponibilité de l’un des membres de la composition, empêché pour des raisons de santé.
C’est le greffe de la Cour, représenté par la greffière en chef, Marie-Josée Benteke, qui a annoncé la nouvelle à l’assistance. «Le verdict a été reporté à jeudi
prochain (le 23 juin). Il y a un juge de la cour qui est malade », a-t-elle déclaré, sans autre précision.
Pour rappel, huit personnes, essentiellement des éléments de la Police nationale congolaise, sont impliquées dans ce procès en qualité de principaux accusés.
Toutefois, seuls cinq prévenus ont comparu jusqu’à ce jour, les trois autres étant toujours en cavale.
Dans son réquisitoire, le ministère public avait requis la peine de mort contre le colonel Mukalay, principal accusé, un lieutenant et les trois fugitifs. Alors
qu’une peine de 20 ans de prison a été requise contre les trois autres accusés présents.
A en croire des sources ayant été en contact avec le greffe de la Cour le mercredi 15 juin 2011, aucune ombre de doute ne planait sur le prononcé du verdict ce
jeudi 16 juin. Souveraine, la Cour a déjoué tous les pronostics, s’adjugeant encore d’une semaine pour mieux rendre son délibéré, le temps, pour elle, de faire l’unanimité de ses
membres.
Comme toujours, ce report a suscité des commentaires en tous sens. Certains y ont vu une fuite en avant de la Cour, ballotée entre dire le droit ou protéger des
intérêts en jeu dans ce processus sur lequel, rappelle-t-on, la communauté internationale entend voir la RDC faire la preuve de sa volonté de garantir les libertés individuelles et assurer une
justice juste pour tous.
La déception se lisait donc jeudi au sortir de la grande salle d’audience de la prison centrale de Makala. La partie civile, dépitée, n’a pas pu retenir sa
désapprobation.
Versions croisées
La confusion et l’incompréhension étaient au rendez-vous déjà à l’entrée hier jeudi de la prison centrale de Makala. Des avocats de la défense et des parties
civiles, plusieurs dizaines de militants des droits de l’Homme et même un représentant du ministère public au procès, qui n’avaient pas été informés officiellement du report de l’audience, se
sont présentés comme prévu au centre de détention.
Me Willy Bawikila, de la partie civile s’est dit surpris d’apprendre comme tout le monde que l’audience est reportée. Actuel directeur de l’ONG la Voix des sans
voix (VSV), Dolly Ibefo, a parlé d’une manœuvre de la cour. Selon lui, «ce procès est une comédie». Le colonel Franck Molisho, du ministère public, a dit avoir appris sur place le report. «Comme
toutes les parties»
Décidément, le procès Chebeya est encore loin de livrer son secret. La Cour semble procéder par à-coups, entretenant le suspense sur la révélation du vrai coupable,
selon le vœu des parties civiles. D’aucuns craignent que dans ces manœuvres, la vérité ne soit camouflée in fine. Cela après un procès qui a tenu en haleine l’opinion nationale et
internationale.
Pour l’instant, rien n’est encore connu. Seule la Cour militaire de Gombe détient le secret de ces sept (7) mois de grande bataille juridique.
La RDC joue sa crédibilité
Dans le procès Chebeya, la RDC joue sa crédibilité en tant que nation respectueuse des droits de l’Homme, d’une part. C’est la justice congolaise qui joue sa
survie, d’autre part. Elle doit aujourd’hui prouver qu’elle s’est affranchie de la mainmise d’autres pouvoirs, notamment le pouvoir exécutif. Le procès Chebeya paraît donc comme un test sur la
voie de la démocratisation de l’Etat congolais.
Vu sous cet angle, l’enjeu confirme qu’une peur bleue s’est emparée de tout le monde, face au verdict qui sera prononcé. Sans anticiper, ce report devra permettre
aux hommes à la blouse noire de crédibiliser davantage leur pouvoir régulièrement mis en cause par une opinion très critique à son égard.
Militant actif des droits de l’Homme, directeur exécutif de la Voix des Sans Voix, Floribert Chebeya, 47 ans, a été retrouvé mort le 2 juin 2010 dans sa voiture sur
la route de Matadi à hauteur de Mintendi, les poignets portant des marques de menottes. La veille en fin de journée, il s’était rendu à l’Inspection générale de la police pour un rendez-vous avec
le chef de la police, l’inspecteur général John Numbi, suspendu depuis de ses fonctions. Son chauffeur, Fidèle Bazana, qui l’avait accompagné, n’a jamais été retrouvé.
Selon le président des Avocats sans frontières/France, Me François Cantier Verdict, le procès Chebeya s’est tenu dans une atmosphère de tension permanente. Il a
salué « l’immense courage » de ses confrères et des défenseurs des droits de l’Homme qui ont tenu jusqu’au bout pour faire éclore la vérité sur cette affaire.
Menacées, les veuves de deux disparus se sont réfugiées à l’étranger. Avant de partir le mois dernier pour la France, Marie Josée Bazana (la veuve du chauffeur de
Floribert Chebeya), avait supplié en vain qu’on lui rende les restes de son mari, pour pouvoir lui offrir une sépulture.