Des rebelles sur le front dans la forêt de Gadayem, à l'ouest de Tripoli, le 21 août 2011 © AFP Filippo Monteforte |
Une opération était en cours dimanche dans la capitale libyenne pour isoler le colonel Mouammar Kadhafi, selon le Conseil national de transition (CNT, organe politique de la rébellion) basé à Benghazi (est), tandis que des insurgés se rapprochaient de la capitale depuis l'ouest.
Déclenchée samedi soir à Tripoli, "l'opération sirène se déroule en coordination entre le CNT et les combattants rebelles dans et autour de Tripoli", a expliqué Ahmed Jibril, porte-parole du CNT, précisant que "l'Otan est également impliquée".
"Il était prévu que l'opération débute hier (samedi) soir et nous estimons qu'elle devrait durer plusieurs jours jusqu'à ce que Kadhafi soit assiégé", a-t-il dit, ajoutant: "Nous prévoyons deux scénarios: qu'il se rende ou qu'il s'échappe de la ville" pour se réfugier à l'étranger ou dans une autre ville.
"Les gens ont commencé à bouger de façon organisée hier soir, les cellules (rebelles) ont agi en coordination, tout a commencé au même moment, ce qui démontre que c'est une opération organisée", a également commenté à l'AFP le porte-parole militaire du CNT, le colonel Ahmed Omar Bani.
"Les graines de la révolte ont enfin commencé à éclore dans Tripoli, la barrière de la terreur est tombée, c'est le temps du refus et de la parole dans tout Tripoli", s'est-il félicité.
De son côté, le porte-parole du régime a affirmé lors d'une conférence de presse que des milliers de Libyens étaient prêts à défendre leur capitale, bastion de Mouammar Kadhafi.
Ahmed Jibril, porte-parole de la rébellion, le 3 juin 2011 à Vienne © AFP/Archives Samuel Kubani |
"Tripoli est toujours défendu. Nous avons des milliers de soldats professionnels et des milliers de volontaires qui protègent la ville. Ces gens ne sont pas seulement patriotes mais ont des familles et des maisons qu'ils veulent protéger et comprennent bien que si les rebelles entrent, le sang sera partout", a déclaré Moussa Ibrahim.
Sur le terrain, les rebelles du front ouest étaient à une vingtaine de kilomètres de Tripoli où des explosions et des échanges de tirs nourris se poursuivaient dimanche selon des témoins, qui ont également fait état d'"affrontements".
Les rebelles ont pris dimanche matin une forêt à 24 kilomètres à l'ouest de Tripoli après des combats meurtriers contre les forces fidèles au colonel Kadhafi, a affirmé à l'AFP un insurgé.
A leur approche, de nombreux quartiers de la capitale étaient en ébullition dimanche matin et des affrontements opposaient pro-Kadhafi et insurgés, selon des témoins. Les tirs se sont calmés pendant une grande partie de la matinée dimanche avant de reprendre de manière sporadique dans le centre ville et à Tajoura (banlieue), toujours selon des témoins.
Peu après 04h00 (02H00 GMT), quatre puissantes explosions ont secoué Tripoli et l'Otan, qui la bombarde quasi-quotidiennement, a annoncé dimanche y avoir détruit samedi 22 objectifs militaires.
Les rebelles prennent position après des combats contre les forces loyalistes, dans une forêt à l'ouest de Tripoli, le 21 août 2011 © AFP Filippo Monteforte |
Un navire maltais qui devait évacuer dimanche des étrangers de Tripoli vers Malte n'a d'ailleurs pas pu entrer dans le port à cause des tirs qu'il a essuyés, a déclaré à l'AFP une porte-parole du ministère polonais des Affaires étrangères Paulina Kapuscinska.
Le régime, qui a reconnu des infiltrations "de groupes isolés", a envoyé dimanche des messages sur les téléphones portables appelant "le peuple à éliminer les traîtres et les agents avec des armes et à les piétiner", a indiqué un journaliste de l'AFP.
Peu avant, Seif al-Islam Kadhafi, un des fils du dirigeant libyen a réaffirmé que le régime "n'abandonnerait pas la bataille" tout en invitant la rébellion au dialogue, dans un discours diffusé tôt dimanche par la télévision officielle.
Dans la nuit la télévision officielle a diffusé un message sonore du colonel Kadhafi exhortant ses partisans à "marcher par millions" pour "libérer les villes détruites".
Dans le même temps, l'ancien numéro deux du régime libyen Abdessalem Jalloud, qui a fui Tripoli vendredi et se trouve actuellement en Italie, a appelé la tribu du colonel Kadhafi à renier "ce tyran", dans une déclaration diffusée dimanche par Al-Jazira.
A l'étranger, de nombreuses capitales se félicitaient des derniers développements en Libye.
La "tragédie" du conflit en Libye "touche à sa fin", a ainsi jugé le chef de la diplomatie italienne Franco Frattini dans une interview à Il Mattino parue dimanche, estimant que la chute du régime Kadhafi créera de "grandes perspectives" pour les entreprises italiennes.
Le "soulèvement à Tripoli" a commencé, et la situation dans le pays est "à un point extraordinairement crucial", a de son côté estimé dimanche le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères Alistair Burt sur la chaîne Sky News.
Sur le plan diplomatique, Tunis a reconnu dimanche le CNT comme représentant légitime du peuple libyen, selon l'agence TAP.
Avant la Tunisie, qui accueille sur son sol des centaines de milliers de réfugiés libyens, plus d'une vingtaine de pays ont reconnu le CNT depuis fin février.