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Beni : les chefs coutumiers ne jugent plus les affaires de viol

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Crée le 17-02-2012-  12h40 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE. Mis à jour le vendredi 17-02-2012 - 14H09 AFRIQUE REDACTION PAR :LE POTENTIEL

 



A Beni, dans le Nord-Kivu, les chefs coutumiers n’arrangent plus les affaires de viol à l’amiable ou selon la coutume, ils défèrent les auteurs présumés au tribunal. Très écoutés des populations, ils expliquent aussi aux jeunes que la loi punit sévèrement les violeurs. A Mayi-Moya, Jonas Komanda Kibondo, le chef de ce village situé au bord de la Nationale n°4 qui relie la ville de Beni à Kisangani (Province Orientale), a récemment rassemblé les jeunes sur le terrain de football, pour les aviser que désormais, il ne recevra plus les violeurs sous sa paillote pour les réconcilier avec leurs victimes, comme il avait coutume de le faire jusque-là. « Malheur à celui qui osera encore violer. Si vous avez besoin d’une femme, vous ferriez mieux de vous marier. Car, il n’y aura plus d’arrangement familial avec les violeurs », les a-t-il avertis, frontalement.

Depuis plus d’une année, une vingtaine de chefs coutumiers du territoire de Beni, dans le Nord-Kivu, font en effet passer auprès des hommes, les jeunes en premier, ce genre de message, pour tenter d’endiguer les violences sexuelles, très courantes à l’Est de la RD Congo depuis plus d’une décennie. Les guerres successives des années 90 et la multiplication de bandes armées qui recrutent de nombreux jeunes dans cette partie du pays, ont multiplié ces viols, aujourd’hui considérés comme une arme de guerre.

PRIMAUTE A LA LOI

Très écoutés de leurs populations, les chefs coutumiers sont ainsi mis à contribution par des ONG dans la lutte contre ces crimes. Ils parlent sans tabou des dangers et des conséquences des violences sexuelles dans leurs communautés. Ils attirent l’attention des jeunes sur les risques d’arrestation et d’emprisonnement qu’ils encourent, s’ils sont reconnus auteurs de tels actes. « Aujourd’hui, vous pouvez gâcher votre vie pour un plaisir de quelques secondes. Car, la loi punit très sévèrement les violeurs », disait à ses administrés, Kombi Kunahimbire, chef de groupement de Lume, dans le secteur de Rwhenzori.

Entre 2010 et 2011, ils ont été, eux-mêmes, formés par des ONG sur des questions liées aux relations homme-femme (violences sexuelles, genre, coutume…). Ils ont aussi été sensibilisés sur leur incompétence à juger ces crimes. Car, jusque-là, ces gardiens de la tradition s’immisçaient dans les affaires de viol qu’ils jugeaient selon la coutume. « Nous leur avons expliqué et remis le livret de la loi du 20 juillet 2006 qui modifie et complète le décret datant de 1940, portant Code pénal congolais, pour leur montrer le danger qu’ils courent en cas d’interférence dans le jugement », précise Nadia Ngandu, coordonnatrice de Great lakes human right program, l’ONG qui a lancé cette initiative d’impliquer les chefs traditionnels dans la lutte contre les violences sexuelles.

Dans les villages où les habitants les écoutent et obéissent généralement à leur mot d’ordre, leur implication dans cette lutte a du bon. Pour le moment, « j’ai instruit tous les « capitas » de mon village de ne plus juger les violeurs. Dès qu’ils sont saisis d’une telle affaire, ils doivent immédiatement transférer le dossier à l’autorité compétente », explique le chef du secteur Beni-Mbau. Muhindo Sibendire, du village Bulongo, en témoigne. Un père de famille, accusé d’avoir récemment violé une fille de 15 ans, « a voulu payer des chèvres conformément à notre coutume. Mais nous avons demandé à la famille de la victime de porter l’affaire devant la justice », raconte-t-il.

UNE METHODE QUI PORTE

« Personne ne peut s’opposer à leur discours », se félicite Kekumba Miyanga, membre du Conseil d’administration de Great lakes human right program. D’après le rapport annuel de l’ONG de défense des droits de l’Homme Ashado, plus de 100 viols ont été enregistrés en 2011 dans le territoire de Beni. Certains auteurs présumés de ces crimes ont été effectivement traduits en justice, mais d’autres courent dans la nature…

Avocat, Me Alphonse Musubao indique qu’avant l’évasion spectaculaire de la prison centrale de Beni, en novembre 2011, sur les 450 détenus de cette maison pénitentiaire, 360 étaient poursuivis pour viols. Souvent, « ils sont arrêtés après dénonciation des familles des victimes par le truchement des chefs de village, par des OPJ ou des magistrats. ».


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